Samedi 9 mai 6 09 /05 /Mai 19:25

     Eugénie la remarqua alors qu’elle sortait du bâtiment réservé à sa filière – les laboratoires des BTS de biotechnologies – et qui jouxtait celui des sciences sociales.

     De loin, alors que l’un entrait et l’autre sortait, elles se croisèrent du regard. L’espace d’un instant, pour la première fois de la semaine Eugénie se sentit les pieds sur terre. Ces yeux sombres l’interpellaient puissamment. Comme si cette inconnue voulait entrer en contact avec elle.

     En premier lieu, surprise par l’intensité de son regard, Eugénie baissa le sien puis se reprit. Elle redressa les yeux pour renouer le contact.

     L’inconnu lui souriait d’un sourire aussi engageant qu’intriguant. Elle hocha imperceptiblement la tête avant de faire demi tour. Le regard d’Eugénie descendit à mesure que l’inconnue se tournait. Elle portait un jean simple qui aurait pu aller autant à un homme qu’à une femme. Il laissait cependant deviner un postérieur des plus plaisants et de fines jambes.

     Le lendemain, vendredi, Eugénie la vit à deux reprises. La première fois, à la pause de dix heures, en train de fumer une cigarette avec un des garçon du lycée ayant l’une des réputations les plus sulfureuses – coma éthylique à un anniversaire, ébriété sur la voie publique, expulsion pour trois jours du lycée, rumeurs persistantes de bisexualité. Elle eut l’impression que l’inconnue lui fit un clin d’œil quand leurs regards se croisèrent. La deuxième fois, peu avant la reprise des cours en début d’après-midi, elle la surprit, encore de loin, en pleine conversation téléphonique. Plus rien ne semblait exister autour d’elle que ce qu’on lui disait à l’oreille et qui ne la rendait pas souriante. Bien au contraire. Eugénie eut la très vive impression de voir sur son visage un mur infranchissable établissant une limite très nette entre celle qui semblait être et la réalité de sa vie.

     Le contraste entre ces deux visions fugaces intrigua au possible Eugénie. Elle voulait d’ors et déjà en savoir plus sur cette inconnue. A la sortie des cours, par relations interposées, elle réussit à grappiller quelques informations. Elle s’appelait Charlotte, elle venait de se faire renvoyer d’un internat lyonnais et elle avait déjà eu maille à partir avec une enseignante. Eugénie trouva que ce qu’elle venait d’apprendre cadrait très bien avec l’idée qu’elle se faisait de Charlotte. Son regard cadrait parfaitement avec ces informations. Une réputation déjà solide. Eugénie n’en eut que plus envie de l’approcher, de faire sa connaissance.

Le mot décrivant le mieux Charlotte s’imposa à l’esprit d’Eugénie le lendemain, alors qu’elle faisait les vitrines du centre-ville.

     En passant devant une boutique de lingerie, elle tomba en arrêt devant une parure. Elle était en dentelle noire rehaussé de motifs bordeaux. Le noir était intense et le bordeaux profond, nuances qui se mariaient à merveille. Les deux bonnets du soutien gorge ressemblaient aux pétales d’une rose mais une rose vénéneuse, non pas une rose romantique.

     Et c’est ce mot là qui décrivait le mieux Charlotte. Elle avait un charme vénéneux, une présence troublante. L’apparition de ce mot dans son esprit acheva de concrétiser la place qu’elle avait rapidement occupée dans ses pensées. Un sourire empreint de désir barra alors son visage, avant qu’Eugénie ne pousse la porte de la boutique.

     A la vendeuse, très probablement une étudiante blonde qui finançait ses études, elle demanda à essayer la parure noire et violette en vitrine. La jeune femme eut un regard entendu.

     « Très bon choix. Cet ensemble est hypnotique. Je l’adore. »

     Dans la cabine, Eugénie posa le soutien gorge devant elle et prit le string – qui était en fait plutôt un tanga - dans ses mains pour le mettre devant sa jupe. Elle s’observa un instant, ravie.

     « De toute façon, tu vas l’acheter, hein ? se dit-elle droit dans les yeux. »

     Puis elle glissa ses mains sous sa jupe pour faire rouler la petite culotte qu’elle portait. Snetir l’étoffe, la dentelle de ce dessous glisser le long de sa peau, sentir le contact de ses bas contre la paume de ses mains la fit frissonner. Elle ferma les yeux, enfila le tanga puis s’adossa à la cabine, toujours face au miroir. Elle posa ses mains sur sa jupe et la releva doucement d’abord mais apercevoir le haut de ses bas électrisa Eugénie. Alors, elle hâta le lever de rideau sur son entrejambe pour faire apparaître sans plus tarder la dentelle du tanga. Il enserrait son sexe et laissait aisément deviner ses lèvres intimes. Cette vue la combla d’aise.

     « Ma chatte, se dit-elle se prononcer les mots, avant de poser sa main gauche sur la dentelle, noire à cet endroit. »

     Sans plus attendre, elle commença à se caresser. Rapidement, à mesure que la moiteur envahissait le nouvel ensemble, les mots et les gestes du bûcheron envahirent ses pensées. Ils se superposèrent aux images de Charlotte qui l’habitaient depuis quelques jours. C’était elle qui lui ordonnait de trousser ses jupons. C’était sa langue qu’elle sentait explorer son intimité. C’était ses doigts qu’elle sentait en elle en lieu et place de la verge du bûcheron.

     Eugénie n’avait jamais d’attirance pour aucune fille tout comme elle n’avait jamais songé à des étreintes semblables à celle de son rêve pourtant elle s’abandonnait sans mal, le plus naturellement du monde, au plaisir que ces images provoquaient en elle. Eugénie sentait confusément que quelque chose était en train de se produire en elle.

     Le cours de ses pensées et de son action fut brutalement interrompu par la vendeuse qui toqua à la porte de la cabine.

     « Mademoiselle ? »

     La voix était courtoise mais ferme.

     Eugénie ouvrit les yeux, comprima un éclat de rire et, amusé, sourit à son double.

     « Je prends la parure, n’ayez crainte, répondit-elle. »

     Ce demi-aveu sur la nature réelle de son activité dans la cabine et sa réaction allait dans le sens du changement qui s’opérait en elle.  En temps normal, elle aurait eu honte, elle aurait rougit d’être ainsi interpellée et surprise. A vrai dire, avant son rêve, elle n’aurait jamais eu l’envie de se caresser dans une boutique de lingerie.

     Sous l’action de ses doigts, son plaisir grimpa en flèche. Elle voulait ce plaisir, elle voulait se faire jouir, elle voulait s’abandonner aux images qui la troublaient avec une facilité déconcertante. Son orgasme fut bref et intense, comme un éclair trouant la profondeur de la nuit. Dans un mouvement incontrôlable de son corps, l’arrière de sa tête vint heurter avec force la cabine, ébranlant le silence feutré de la boutique. Eugénie crut entendre la vendeuse pouffer discrètement de rire.

     Peu après, elle était face à elle.

     « Je connais le prix, vous n’avez pas à soulever votre jupe, lui envoya la vendeuse, taquine. »

     Eugénie lui répondit par le même sourire.

     « Mais si vous désirez que je soulève votre jupe, je peux le faire, osa, avec moins d’assurance, la vendeuse, déjà troublée.  »

     Mais une cliente fit retentir la sonnerie de la porte, dissipant en un instant la tension érotique de la situation. Eugénie en profita pour sortir son porte monnaie. Par chance elle avait la somme exacte en liquide sur elle. En s’éclipsant, alors que la dame – une bourgeoise enrobée de 60 ans – expliquait les raisons de sa visite, elle plongea son regard dans celui de la vendeuse. Le même désir, la même envie de jouer.

     « Au revoir. Je repasserai peut-être. »

     Puis elle s’éclipsa. Dans la rue, un homme s’arrêta de marcher pour la regarder passer. Ses fesses, sa démarche ainsi que la discrète et subtile odeur de lingerie et de plaisir qui émanait d’elle le pétrifièrent sur place. Mais Eugénie ne remarqua rien, toute entière accaparé par la vendeuse et sa proposition. Non. Pas seulement par cette vendeuse. Aussi par Charlotte. Car l’idée première qui lui venait à l’esprit n’était pas celle d’avoir presque cédée aux avances d’une femme mais bien plutôt qu’elle aurait voulu que Charlotte soit la vendeuse. Comme si jouer avec la vendeuse aurait été trahir la belle inconnue. Et tout cela, alors même qu’elle ne lui avait jamais parlé.

     Le soir-même, elle fit un second rêve.

Par Chevalier de Ferreol
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